Monsieur le Ministre,
je quitte votre école et votre idée de
l’éducation qui « n’est pas une variable d’ajustement » selon vos propos. Pour
être assez franc, je suis heureux de ne plus rien vous devoir hormis la
politesse qu’une éducation stricte et désuète m’a apprise.
J’ai tenté d'être un professeur honnête,
comme la grande majorité d’entre nous, pas toujours enclin à courber l’échine,
certes, mais assez intègre. Et puis mes élèves ne furent pas tous déçus de mes
enseignements, certains ont même réussi à me surpasser, et c’est ma seule
récompense durable et notable. Le reste m'importe peu, et votre réussite non
plus.
Quant au reste, j’ai parfois côtoyé
quelques collègues et tissé des liens d’amitié. Avec d’autres, parfois, ce fut
une foire d’empoigne sur des futilités d’emploi du temps, ou d’heures
supplémentaires qu’ils se battaient pour obtenir. Quelques chefs
d’établissement amènes et respectueux, d’autres plus arrivistes et moins
humanistes, Et puis quelques "sachant", promus Inspecteurs, dont le
zèle n’avait d’égal que leur haine du professeur qu’ils étaient autrefois, peut
être par vengeance d’un savoir-faire qu’ils n’ont jamais su mettre en œuvre. Le
pouvoir rend parfois autoritaire, et suffisant.
Voilà qu’elle a été ma courte apparition
dans votre maison dont vous garantissez, paraît-il, l’intégrité et la cohésion,
entre autres.
Aujourd’hui, avant de tirer le rideau de
cette scène, théâtralisée par vos atermoiements et vos promesses non tenues, je
vous laisse en héritage cette petite réflexion.
Je n’aborderais pas la problématique des
« burn-out » ou des suicides dans votre institution, car elle m’engagerait sur
un grave constat d’abandon de cette même institution, bien campée dans
l’omerta. Pas davantage je n'évoquerais nos réclamations salariales, elles se
dissolvent, à bas bruit, dans les arcanes de votre pouvoir décisionnaire.
J’attire votre aimable attention sur la
situation des travailleurs empêchés dans les écoles, collèges, et lycées. Leurs
conditions de travail. Les risques sanitaires dans les ateliers industriels ou
du bâtiment pour les PLP, par exemple, qui exposent votre personnel à des
risques de santé, de sécurité, tant ils sont confrontés quotidiennement, à
toutes sortes d’agents pathogènes et cancérigènes. Ce n’est pas le COVID qui
m’a contraint à quitter votre barque erratique prématurément, même si mon âge
n’est plus une valeur sûre.
Aujourd’hui, comme hier, l’inquiétude de
vos personnels est légitime, elle mérite votre attention, et il est de votre
devoir d’y répondre.
Le manquement de mon ministère de tutelle
à ses obligations d’employeur en matière de prévention médicale, n’est pas
nouveau. Le mépris, par le silence, de donner suite à mes requêtes sur
l’obligation de nous fournir des Equipements de Protection Individuelle comme
le stipule l’Article R.4321-4 du Code du Travail. Voilà une preuve factuelle de
votre détachement.
Le non-respect de la loi de votre
Ministère. L’article L.4121-1 du code du travail, stipule que l’employeur doit
prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé
physique et mentale des travailleurs ».Alors, pourquoi ce qui serait valable
pour éviter un COVID, ne le fut pas tant d’années auparavant, pour protéger ma
santé et celles de tant d’autres ?
Vos professeurs d’atelier dans les
Lycées Professionnels, dans les SEGPA , dans les collèges ,les écoles, sont au
service de l’éducation pour faire bénéficier tous les jeunes de leur
expérience, de leur expertise des métiers, du savoir, et ce, dans des domaines,
en LP, aussi divers que : Charpente, Menuiserie, Maçonnerie, Peinture,
Plomberie, Métallerie, etc.
Aucun personnel ne peut faire l’impasse
sur la prévention médicale et le suivi de leur santé, car ils sont pour la
plupart exposés aux bruits, aux agents pathogènes, ou, cancérigènes, et donc
très vulnérables. Ils ne doivent pas être privés de la sécurité que vous leur
devez.
Leurs conditions de travail et le suivi
médical de prévention sont l’assurance d’une éducation nationale forte et d’un
service public efficace. Vous n’êtes pas à la hauteur de vos ambitions, pas
davantage que vos prédécesseurs. Vous balbutiez votre apprentissage
ministérielle comme un jeune apprenti, mais votre entrain initiatique est bien
davantage grave de conséquences si vous faites l’erreur du novice.
Ces professeurs, Monsieur le Ministre,
qu’ils soient dans des ateliers, dans un labo de sciences physiques, dans un
gymnase, et même dans les écoles, doivent pouvoir bénéficier gratuitement des
EPI fournis par l’employeur, lorsqu'ils s'avèrent indispensables. Ils doivent
pouvoir obtenir une visite médicale de prévention annuelle ou bi annuelle selon
leur degré d’exposition aux nuisances (qu’elles soient sonores ou liées à tout
autre facteur de dangerosité, réelle, ou supposée).
Monsieur le Ministre de l’Education
Nationale, je vous accorde mes respectueuses salutations, s’il vous arrivait en
retour, de croire à notre grande considération du Service Public, ainsi qu’à
l’intérêt que nous portons toutes et tous pour la formation et l’éducation de
nos élèves.
PS : Je ne suis plus une variable d’ajustement.